Bagchi (R.), Xingbo LI (X.), « Illusionary progress in loyalty programs: magnitudes, reward distances, and step-size ambiguity », Journal of consumer research, vol. 7, n°1, pages 888-901, 2011.
Cet article compare la perception des consommateurs à l’égard des différents types de programmes de fidélité qu’ils utilisent. Les auteurs cherchent à savoir dans quelle mesure le système de récompense adopté par l’enseigne influence la psychologie du consommateur.
1- Sujet
Aux États-Unis, on recense plus d’un milliard de membres inscrits à des programmes de fidélité. Pour autant, moins d’un quart déclarent avoir perçu une récompense. Or, on sait que les programmes de fidélité constituent une source d’information conséquente sur le comportement d’achat des consommateurs. Il est dès lors impératif pour les enseignes de développer des programmes efficaces, qui ne découragent pas leurs clients.
Un système de rétribution comporte deux éléments d’information : la
« distance de récompense » (points nécessaires avant de récupérer les gains) et les « paliers de récompense » (points gagnés par dollar dépensé). Selon l’ampleur utilisée (100 vs 1000), les deux éléments d’information seront plus ou moins importants aux yeux du client. Enfin, les auteurs ont identifié un modérateur, « l’ambiguïté du palier ».
Pour étayer leur recherche, les auteurs prennent l’exemple de deux personnes qui adhèrent à un programme : Neera et Farah. Toutes les deux sont inscrites au programme décrit ci-dessus (100 pts) et cumulent des points pour recevoir 6$. Neera est plus proche étant donné qu’elle a déjà accumulé 80% des points nécessaires. A l’inverse, Farah n’en a que 20%. Si la récompense s’inscrivait dans un programme de plus grande ampleur (1000 pts), Neera aurait 800 points et Farah 200. Comparée à Neera, Farah aurait l’impression d’être moins proche du but alors même que l’évolution est proportionnelle.
2- Questions de recherche
Dans cet article, les auteurs mettent en avant deux problématiques. Comment la « distance de récompense » et les « paliers de récompense » affectent les impressions de progrès, le comportement d’achat, la fidélité, et la probabilité de recommandation? Dans quelle mesure les membres ont-ils recours aux deux éléments à la fois?
3- Conclusions
Les auteurs définissent l’ambiguïté des paliers comme « l’impression subjective qu’une prédiction n’est pas fiable » car le sujet manque d’informations. Par exemple, dire à un consommateur qu’il devra dépenser entre 10 et 20€ est plus ambigu que lui dire qu’il devra dépenser soit 10€, soit 20€, pour obtenir une certaine quantité de points.
Les auteurs constatent que lorsque l’ambiguïté est élevée, seule la distance est prise en compte par le client pour évaluer sa progression dans le programme. Lorsqu’elle est faible, les consommateurs prennent en compte à la fois la distance et les paliers. Réduire l’ambiguïté affecte les perceptions au sein d’un programme. Dans les programmes de grande ampleur, les tailles de palier sont plus grandes. Les effets de la distance sur la perception sont donc atténués dans les conditions de faible ambiguïté, mais pas dans en cas de haute-ambiguïté où les individus basent leurs jugements seulement sur la distance.
4- Implications managériales
La perception de la progression dans le programme influence à la fois la fidélité et la probabilité de recommandation de l’enseigne à des proches.
Ces résultats peuvent être utilisés pour concevoir un programme de fidélité efficace. L’efficacité pourra être améliorée en paramétrant l’ambiguïté en fonction de la progression réalisée par le consommateur.
5- Limites
Les auteurs utilisent l’exemple de deux personnes qui présentent des perceptions différentes à l’égard d’un même programme. Ces perceptions sont fonction du niveau de points atteint. Néanmoins, il eut été possible d’utiliser une seule et même personne. On aurait alors comparé ses impressions, selon qu’elle se situe plus ou moins près de la récompense.
D’autre part, les auteurs utilisent volontairement un exemple de rétribution neutre, en points. Il est ainsi possible de l’appliquer à des unités diverses : dollar, pesos, kilomètres, etc. Mais ils n’expliquent pas les éventuelles conséquences que cela pourrait avoir sur les modes de pensée des clients.
6- Méthodologie
Les auteurs ont mené deux études. Pour la première ils ont utilisés une carte de GSA pour analyser la fidélité et la probabilité de recommandation. Pour la seconde étude, les auteurs ont utilisé une carte de restaurant. Les participants répètent des achats et accumulent des points qu’ils pourront échanger contre un dîner gratuit.
L’étude n°2 sert à renforcer les conclusions de l’étude n°1 en répliquant les résultats dans un contexte différent.
Pour l’étude n°1, 246 personnes ont été interrogées. Il s’agit d’étudiants de premier cycle. La moyenne d’âge est de 20 ans, et 47% sont des femmes. A noter que 240 observations ont été conservées.
Pour l’étude n°2, 310 personnes ont été recrutées sur internet (33 ans de moyenne d’âge, 61% de femmes), ainsi que 75 étudiants de premier cycle (21 ans de moyenne d’âge, 47% de femmes). A noter que 375 observations ont été conservées.
Synthèse réalisée sous la direction de Jean-François TRINQUECOSTE.